Un tour aux Lucioles

Par Sylvain Poncet, Chargé de dossiers.

Cela fait longtemps que je ne suis pas allé à Vienne, qui n’est pourtant qu’à vingt petites minutes en voiture de chez moi et vaut largement le détour, quoique de dimension plus modeste que son homonyme autrichien.

C’est un plaisir de me promener dans le centre historique de Vienne : le jardin archéologique de Cybèle, le théâtre antique, le belvédère de Pipet et bien sûr le temple romain d’Auguste et Livie. C’est d’ailleurs là que je vais, à la librairie Lucioles – client que l’équipe des Bees se fait une joie d’accompagner au quotidien.

J’ai rendez-vous avec Alain Bélier, l’un des co-gérants de la librairie. Il me raconte l’histoire et le fonctionnement de la librairie. Celle-ci a été créé en 1976 par Michel Bazin et a connu de multiples déménagements et agrandissements jusqu’à passer de 30 à 250m². Suite au départ à la retraite de M. Bazin, Alain Bélier et Renaud Junillon reprennent l’activité en 2011 et continuent depuis cette belle histoire.

La librairie en chiffres

La librairie vend environ 250 000 livres par an, détient un stock de 35 000 ouvrages, se fait livrer 1 à 4 palettes par jour et organise 200 événements par an (rencontre d’auteurs, dédicace, table ronde…) !

Elle est l’une des plus grosses librairies indépendantes de Rhône-Alpes et un acteur majeur de l’agglomération de Vienne et ses alentours. Si son activité principale reste la vente au sein de la boutique, elle a su se développer auprès des collectivités locales : plus de 80 médiathèques et les groupes scolaires. Elle prend également part aux événements extérieurs (Quai du Polar à Lyon, Fête du livre de Bron, Festival America à Vincennes…). Enfin, la librairie participe au Festival Vendanges Graphiques à Condrieu, sur le thème de la BD et du vin, dont Fifty Bees est un partenaire financier depuis sa création.

Mais au fait… Pourquoi acheter un livre en librairie plutôt que sur Internet ou en hypermarché ? Une loi importante, assez méconnue et pourtant bien présente dans notre quotidien, est celle du prix unique du livre (loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre, dite loi Lang (du nom de Jack Lang, ministre de la Culture). C’est l’éditeur qui fixe le prix. Les détaillants ne peuvent pas se faire concurrence. Un livre ne sera donc pas plus cher en librairie que sur Internet ou en hypermarché…

 

Alain Bélier me raconte pourquoi il a repris la librairie.

« Quand j’étais ingénieur, j’étais un grand lecteur mais on était incapable de me conseiller. Il y avait des magasins qui étaient dépôts de livres mais ne me guidaient pas dans le choix de mes lectures. Un jour, j’ai demandé : « j’ai lu un tel, un tel, que me suggérez-vous ? » Et on m’a répondu : « Regardez les 4e de couverture… ». En arrivant en 2001 à Vienne, je suis tombé sur cette librairie. J’ai demandé conseil et on m’a donné un livre fantastique entre les mains. Je suis revenu une 2e fois, encore un livre incroyable. Je suis devenu grand lecteur, puis me suis intéressé à la vie de la librairie. Lorsque M. Bazin a voulu partir à la retraite, j’ai souhaité continuer son activité même s’il était difficile de passer derrière ce libraire reconnu.

Nous avons la chance d’avoir une structure assez grande (10 salariés) qui permet d’avoir des spécialistes thématiques et de grands lecteurs en mesure de prodiguer des conseils. C’est une vraie chance en tant que lecteur.»

 

Rentrée littéraire

Chaque année, en Septembre, c’est la rentrée scolaire mais aussi la rentrée littéraire. Le cru 2020 comporte quelques 511 romans et entre les livres à rentrer et ceux à sortir du placard, il y a un choix à faire. Pour Alain Bélier, la question ne se pose pas « Nous avons un coin spécial pour les nouveautés mais nous devons garder certains livres qui sont référencés. Ce n’est pas parce que le livre à 5 ans qu’il est daté et que nous devons l’enlever au profit d’un livre récent qui est moins bon. »

La librairie Lucioles, de par sa surface et la participation du CNL, se permet de garder ses livres de fonds (autant en Jeunesse, Roman, etc.) même si cela représente une faible partie des ventes. Ce sont des indispensables pour toute librairie.

« La rentrée littéraire est un moment important mais on est toujours partagé entre aider les éditeurs pour l’accompagnement médiatique et garder ces livres de fonds ».

Et depuis la covid19 ?

La discussion a glissé sur le contexte inédit du confinement récemment vécu et toutes les difficultés liées à cette diminution de la consommation de l’objet « livre ». Cela permet de se questionner sur la place de la lecture dans nos vies.

« Le confinement a confirmé que le livre est un compagnon de vie formidable. Quand on voit les gens qui crient au secours « Pourquoi on ne peut plus acheter nos livres ? », on a cette impression que c’est aussi important que du pain. Alors que non, ce n’est pas vital, mais on ne peut pas concevoir une vie sans livre, surtout en ces temps étranges… »

Aujourd’hui, s’il y a des inquiétudes liées aux activités connexes de la librairie (événements extérieurs, rencontre, relations avec les médiathèques…), le point le plus sensible est la bonne santé des acteurs de la chaîne du livre. Si la librairie arrive à se relever mais que les éditeurs ou les distributeurs ne suivent pas, cela peut avoir de gros impacts sur le « monde du livre ».

Alain Bélier reste positif sur l’activité : « Les messages de soutien que l’on a reçus pendant le confinement étaient extraordinaires. On avait même des commandes sur nos téléphones portables à minuit. Nous souhaitons vivement poursuivre notre projet d’agrandissement la boutique. »

Un bel élan qui donne envie de lire… et de faire un tour aux Lucioles, à Vienne !